Le droit à la déconnexion au travail, une adaptation nécessaire à l’ère du numérique (Partie 2)

Il est vrai que cette disposition parait nécessaire au vu de l’évolution de la société qui impacte tous les domaines de la vie quotidienne d’une personne, surtout le milieu professionnel qui a connu de profondes mutations suite au développement du numérique. Il y a eu des évolutions majeures qui ont engendré une modification totale des habitudes de travail.

Auparavant, puisque les outils de travail étaient matériels, la question de la déconnexion ne se posait pas dans une telle dimension. Mais à présent, grâce ou à cause d’Internet, il n’y a pas de frontière physique entre le lieu de travail et le lieu privé d’habitation du salarié. En effet, le salarié peut ramener chez lui les dossiers à traiter, et les collègues de travail peuvent suivre le salarié chez lui à travers les e-mails, de même que l’employeur, qui peut joindre le salarié à tout moment. Tout ceci crée une pression implicite sur le salarié, ce qui peut engendrer des problèmes relatifs à la santé.

Dans tous les cas, le droit à la déconnexion ne peut s’appliquer que si les entreprises mettent en place les instruments de régulation nécessaires à l’usage de l’outil numérique. Ces règles ont pour but d’assurer « le respect des temps de repos et de congés, ainsi que l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle et familiale ».

Concrètement, le droit à la déconnexion s’exprime par des mesures simples. On peut citer comme exemple l’instauration d’une journée sans mail ou encore la liberté pour les salariés de répondre ou non à leurs e-mails en dehors des heures de travail. En effet, l’exemple type de comportement stressant pour le salarié est l’envoi d’e-mails de sa hiérarchie à 23h. Ce type de pratiques engendre donc des problèmes de respect des temps de repos et de congés.

La dématérialisation des outils de travail grâce à Internet, ne permettent plus de cataloguer distinctement un endroit pour le travail et un endroit pour la vie personnelle du salarié. Tout est lié. La frontière n’est plus petite ou ténue, elle est à présent complètement poreuse voir infime. Les premières victimes sont les cadres, qui n’arrivent pas à « décrocher », même pendant les jours de repos et les vacances. Les salariés ressentent ce même besoin d’ultra-connexion, et certains continuent de travailler même en période de vacances, de peur d’être débordés par la suite lors de la reprise du travail. Mais le droit à la déconnexion peut surtout être une parade contre une pratique insidieuse, celle de la mise en concurrence des salariés par l’employeur, qui pour certains, continuent d’être connectés chez eux, ce qui peut constituer une marque distinctive par rapport à ces collègues de travail. Ainsi, la comparaison entre salariés peut amener à une volonté d’être toujours de plus en plus connecté, dans un souci de gain de productivité.

Ce droit a pour finalité de s’adapter à la réalité du terrain, qui a été fortement modifié suite à la révolution numérique, et de permettre la création de protections pour la santé des salariés. Si le droit à la déconnexion est correctement appliqué, il peut représenter une parade efficace au danger de la connexion permanente et empêcher bon nombre de maladies liées au stress.

Toutefois, la consécration de ce droit n’est pas exempt de critiques. En effet, il apparait compliqué à mettre en oeuvre, notamment parce que son instauration requiert un équilibre entre le droit et le devoir de se connecter, ainsi qu’un changement de culture inévitable au sein de l’entreprise, du fait de l’hyper-connexion. Cela requiert donc l’implication de tous les acteurs de l’entreprise pour que ce droit soit réellement efficace. De plus, l’augmentation de la pratique du télétravail peut engendrer quelques interrogations sur le fait de savoir si ce mode de travail peut être un facteur d’aggravation face à un équilibre déjà précaire entre vie professionnelle et vie personnelle et familiale.

Ainsi, le droit à la déconnexion dans le monde du travail est essentiel face à l’adoption de nouveaux modes de travail, qui est inévitablement impacté par la révolution numérique. Toutefois, la consécration de ce droit ne suffit pas si un changement global de culture au sein de l’entreprise n’est pas effectué. Ce n’est que dans un tel cadre, que l’instauration de ce nouveau droit ne sera pas vain.

 

Pour plus d’informations :

Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels 
Article du Ministère du Travail, de l’Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social sur « La loi travail à l’ère du numérique »